Axes et projets de recherche

Les membres fondateurs du LéaV sont pour la plupart issus des trois anciens laboratoires de l’école de Versailles qui ont développé des compétences reconnues dans l’étude des villes, de leurs architectures, des territoires et des paysages, considérés à travers l’histoire de leur formation et de leurs transformations, dans les domaines de l’urbanisme et de la construction, dans leur rapport à la culture, aux comportements collectifs des sociétés et aux modes de production.

Face au défi de devoir penser la(es) crise(s) et les mutations contemporaines de notre environnement, à celui de mieux comprendre le passé et mieux se projeter dans le futur, les chercheurs de l’ÉNSA Versailles ont fait le choix de renouveler ensemble leurs perspectives générales, leur permettant d’intégrer, au-delà de leur diversité, les différentes visions qu’elles sont susceptibles d’énoncer. Si l’enjeu est de monter en généralité, il est aussi de ne rien perdre de la capacité à apporter des analyses particulières, rigoureuses et documentées. Un deuxième enjeu est de retisser les liens de la recherche à l’action et de rapprocher les chercheurs des acteurs de l’espace urbain. En effet, la mobilisation des chercheurs dans l’espace public, à partir des savoirs qu’ils produisent, nécessite de conjuguer les dimensions critiques de la recherche, qui sont fondamentales, et la mise en avant d’analyses constructives capables d’apporter un éclairage utile du réel, mais aussi d’inscrire les recherches dans un débat d’avenir, au niveau national et international. Pour accompagner et développer ses activités de recherche, le LéaV a placé au centre de sa stratégie une politique partenariale renforcée, notamment au sein des communautés scientifiques des territoires du Grand Ouest parisien. Il entretient également des collaborations pérennes avec de nombreuses communautés scientifiques, nationales et internationales, ainsi que des liens accrus avec le monde socio-économique et culturel.

Le LéaV est un acteur (fondateur) du laboratoire d’excellence Patrima (« Patrimoines matériels : savoirs, conservation, transmission »). Sélectionné dans le cadre des Investissements d’avenir du gouvernement, ce LabEx a été distingué parmi 12 projets français classés A+ dans le domaine des sciences humaines et sociales par le jury international et le Commissariat général à l’investissement, le 25 mars 2011. Le LéaV est engagé dans des programmes et contrats de recherche collectifs (programme interministériel « Ignis mutat res » ; ANR « Villes et bâtiments durables » ; Analyse des mécanismes de collaboration et d’innovation dans la création de la ville contemporaine avec l’Université de Montréal /CFQCU ; programmes en partenariat avec Poste Immo, avec la Fondazione Archivio del Moderno de Mendrisio, Università della Svizzera Italiana, etc.). Il organise des séminaires, des colloques et des journées d’études de niveau international, anime des réseaux de chercheurs, des groupes de travail, publie régulièrement des ouvrages collectifs et accueille des chercheurs étrangers. Il s’inscrit pleinement dans le projet  d’établissement de l’énsa-V, conçu pour accompagner le renouvellement de la pédagogie, avec la mise en place de la réforme LMD : structuration du troisième cycle ; adossement renforcé des formations master sur les activités de recherche ; soutien à l’effort de qualification du corps enseignant. Il encadre des doctorants et des étudiants en master. Il pilote, ou co-pilote, trois masters spécialisés en partenariat avec l’Université.

Axes de recherche

Cet axe propose d’investir le domaine de la recherche et du développement expérimental (R&D). Ses champs de recherche concernent principalement deux domaines d’innovation, fondamentaux pour l’évolution future de l’architecture et du métier d’architecte : la transition écologique (économie de la matière, matériaux biosourcés, bâtiments passifs, construction décarbonée), et le développement du continuum numérique, de la conception à la fabrication digitales.

Son activité, située dans le domaine de la R&D, est encadrée par la définition communément admise par la communauté scientifique, telle qu’énoncée dans le manuel de Frascati, notamment, « le développement expérimental (fondé sur des connaissances obtenues par la recherche ou l'expérience pratique, est effectué – au moyen de prototypes ou d'installations pilotes – en vue de lancer de nouveaux produits, d'établir de nouveaux procédés ou d'améliorer substantiellement ceux qui existent déjà). » Cette activité de développement expérimental constituera le cœur d’activité de l’axe Matière à expérimentation et appellera à nouer des partenariats universitaires, notamment dans l’écosystème « sciences et ingénierie » de l’Université de Paris-Saclay, mais aussi avec la COMUE Paris-Seine dans le cadre de l’EUR Humanities, Creation and Heritage.

S’appuyer sur une culture de l’expérimentation constructive forte
Cet axe est le prolongement vers la recherche d’une culture de l’expérimentation constructive déjà forte, observable dans les enseignements de la formation initiale, tant en licence qu’en master. Ces enseignements sont l’expression d’une culture existante, créative, mais encore sous-valorisée au niveau du laboratoire de l’école. Ce nouvel axe se donne pour mission de prolonger cette culture de l’expérimentation vers la recherche et ses exigences scientifiques, en distinguant les enseignements qui relèvent de la pédagogie par l’expérimentation (apprendre en faisant), de l’expérimentation en tant qu’outil de recherche (élaborer une expérience pour vérifier une hypothèse).

On citera notamment en cycle licence : en première année, un studio de projet court qui associe outils numériques et réalisation pratique à l’échelle 1 pour construire des structures tridimensionnelles aux géométries complexes; un autre studio de projet court réinterroge les structures gonflables à partir de plastiques biosourcés ; en deuxième année, un studio de projet court interroge les dispositifs constructifs à partir de briques de terre crue de la région parisienne (2017) ou les structures tressées en lames de peuplier déroulé (2018) ; enfin, en troisième année, un studio de projet court questionne à la grande échelle le continuum numérique de la conception à la fabrication digitale.

En cycle master, l’atelier de projet long SocialMachine s’inscrit dans la communauté des Makers et DIY pour réinterroger les processus industriels de fabrication grâce à la production d’artefacts à la frontière du design et de l’architecture. En 2017-2018, l’atelier de projet long Cuirs&Peaux a investi le champ des architectures gonflables à partir d’enveloppes en cuir, associant recherche en géométrie constructive numérique et savoir-faire artisanal de bottier. Depuis 2016, le groupe de mémoire Ressources et technologies permet à des étudiants de développer leur mémoire sous forme d’expérimentation et de prototypes construits avec une exigence d’évaluation scientifique des résultats. Enfin, l’ÉNSA Versailles a accueilli, en 2017, le colloque international Design Modeling Symposium, qui a réuni l’excellence universitaire internationale en matière de conception et de fabrication paramétrique, autour du thème Humanizing Digital Reality.

Une synergie avec le FabLab de l’ÉNSA Versailles et le concept d’objets expérimentaux partagés
Notre constat est que la traditionnelle séparation des savoirs, en France, entre les architectes et les ingénieurs, fabrique des coupures épistémologiques artificielles qu’on rencontre moins dans les autres pays occidentaux. En effet, la grande majorité des écoles d’architecture en Europe et dans le monde sont intégrées sous forme de départements à des universités à dominante technologique. Les études d’architecture en France ont, en conséquence, moins de relations aux sciences et techniques, mais cependant une forte culture du projet. À l’opposé, les écoles d’ingénieurs françaises, dont le niveau théorique est excellent, souffrent d’un manque de culture du design au sens anglo-saxon du terme. Dès lors, les recherches menées par ces dernières restent souvent à l’intérieur des limites de leurs disciplines.

Ce nouvel axe fait sens au regard du projet d’aménagement d’un FabLab à l’école en 2019. Il disposera alors d’un outil spacieux, situé dans l’aile de la Maréchalerie. Cette nouvelle structure au service de la pédagogie et de la recherche sera encadrée par un professionnel en cours de recrutement. La qualité de son équipement en outils numériques de prototypage rapide permettra de mener à bien des recherches expérimentales et développer des prototypes de dispositifs constructifs innovants. Réciproquement, l’axe apportera au FabLab un ancrage dans la recherche. La Grande Nef de l’école de Versailles complète ce dispositif pour accueillir les expérimentations à grande échelle. L’association du FabLab et de la Grande Nef, avec ses extensions extérieures (Cour du Quatorze et Cour des Fontaines), constitue un ensemble de type « Grands Ateliers » au service du développement de l’expérimentation constructive à l’ÉNSA Versailles.

Nous souhaitons saisir l’opportunité de la culture du projet des écoles d’architecture pour devenir le support d’expérimentations scientifiques et techniques en situation complexe (étymologiquement « ce qui est tissé ensemble »). En effet, les connaissances formulées à l’intérieur de chaque discipline scientifique concernée par l’acte de bâtir (sciences des matériaux, génie thermique, mécanique, etc.) n’apporte qu’une compréhension incomplète des phénomènes observables dans l’édifice assemblé. Les récents retours d’expérience insatisfaisants des édifices « basse consommation » en témoignent.

Autour du FabLab de l’ÉNSA Versailles, ce nouvel axe propose de développer des prototypes et des installations pilotes dont les problématiques sont partagées entre les différents champs de connaissances de l’architecture, de l’ingénierie et des sciences, en développant des objets expérimentaux pluridisciplinaires. Cette configuration permettrait à l’ÉNSA Versailles de répondre concrètement aux sollicitations qu’elle reçoit de la part de grandes écoles telles que l’ENS-Saclay, ou d’écoles d’ingénieurs comme l’ENSEA ou l’ECAM-EPMI, membres de l’université Paris-Seine.

Relier la recherche au cycle master pour nouer des liens entre pédagogie et recherche
En s’appuyant sur sa culture expérimentale et créative, les enseignants-chercheurs de l’axe Matière à expérimentation ancreraient la recherche dans le cycle master, en favorisant les échanges réciproques entre pédagogie et recherche, pour améliorer la visibilité et l’attractivité du troisième cycle. Le master serait le lieu de recherches exploratoires ouvertes aux démarches originales. Il serait aussi un temps de formulation d’hypothèses, dont les plus intéressantes pourraient être développées en troisième cycle, sous forme de doctorat. Réciproquement, la recherche devrait aussi soumettre ses questions aux capacités d’expérimentation du master.

Plusieurs actions concrètes sont en cours : une recherche exploratoire sur les pratiques existantes similaires dans les ENSA françaises et dans les universités européennes, afin d’aider l’axe à définir son positionnement stratégique. Elle a notamment fait apparaitre la question des matériaux biosourcés comme un enjeu de taille pour la transition écologique ; la constitution d’un groupe de mémoire Matière à Expérimentation, organisé comme un séminaire d’initiation à la recherche, sera effectif à la rentrée universitaire 2018-2019. Le cours théorique de master Pensée constructive et architecture contemporaine sera associé à l’axe de recherche ; enfin, il est prévu l’association à l’axe Matière à expérimentation des ateliers de master Social Machine. Ces liens avec les ateliers de projet permettront d’expérimenter l’idée selon laquelle le projet d’architecture peut être un outil de connaissance, pour autant qu’il soit fondé sur des hypothèses explicites, que les problématiques dans lesquels il s’inscrit soient identifiées, et que les résultats obtenus soient évaluables objectivement. Ce travail participera à la mise en place du doctorat par le projet dans lequel l’ÉNSA Versailles et le LéaV sont engagés.

 Cet axe est coordonné par Stéphane Berthier.

 

Experimental matters

This new area of research focuses on the field of research and experimental development (R&D) and is mainly concerned with two fields of innovation that are fundamental to the future evolution of architecture and the profession of architect: the ecological transition (economy of matter, bio-based materials, passive houses, de-carbonated constructions) and the development of the digital continuum, from digital conception to production.

Its activity, within the field of R&D, is framed by the scientific-community-approved definition provided in the Frascati Manual: “experimental development is intended to result in a plan or design for a new or substantially improved product or process, whether intended for sale or own use. Based on past research or practical experience, it includes concept formulation, design and the testing of product alternatives, and can include construction of prototypes and the operation of pilot plants.” This activity of experimental development will constitute the heart of the area of research Matières à experimentation (Matters and Experimentations) and will lead to university partnerships, particularly in the “sciences and engineering” ecosystem of the Paris-Saclay University, but also with the Paris-Seine COMUE in the context of the EUR Humanities, Creation, and Heritage.

 

Drawing on a strong culture of constructive experimentation

This area of research draws on an already strong culture of constructive experimentation (a strength observable in instruction at the undergraduate and graduate-levels). This instruction testifies to an existing culture that is creative but still undervalued by our research lab. This new area of research aims to extend this culture of experimentation to the field of research and to its scientific rigor by distinguishing instruction that is concerned with learning through experimentation (learning by doing) from those concerned with experimentation as a research tool (elaborating an experiment to test a hypothesis).

In the first year of the bachelor’s degree program, a short building project studio brings together digital tools and full-scale practical design to build tridimensional structures with complex geometry. Another short building project studio questions inflatable structures made with bio-sourced plastic. In the second year, a short project studio class considers construction systems in relation to Paris-area mudbricks (2017) or weaved structures made of poplar wood strips (2018). In the third year, a short project studio questions the digital continuum from design to digital production.

In the master’s degree program, the long project workshop SocialMachine questions the industrial processes of production through the production of artifacts that are at the frontier of design and architecture. In 2017-2018, the long project workshop Cuirs&Peaux (Leathers and Skins) explored the field of inflatable architecture through leather envelopes, bringing together research in constructive solid geometry and traditional bootmaking expertise. Since 2016, the master’s thesis group Ressources et technologies(Resources and Technologies) has enabled students to develop their master’s thesis in the form of experimentations and prototypes that are built with the rigor of the scientific evaluation of results. Finally, the ENSAV has welcomed, in 2017, the international conference Design Modeling Symposium, which brought together international academic excellence in parametric modeling and production around the theme Humanizing Digital Reality.

 

Synergy with the ENSAV’s FabLab and the concept of shared experimental objects

Our belief is that the traditional separation of knowledge in France between architects and engineers creates artificial epistemological ruptures that occur less in other Western countries. Indeed, the majority of architecture schools in Europe and in the world are departments integrated into universities (with technological specialties). Architecture schools in France communicate less with science and technology but they have a strong project culture. Contrarily, French engineering schools have an excellent theoretical level but suffer from a lack of design culture. For this reason, research led by these schools often stays within the limits of their discipline.

This new area of research is coherent with the development of a FabLab at our school in 2019. The lab, housed in the Maréchalerie wing, will be a spacious tool. This new structure centered around pedagogy and research will be led by a professional who is currently being recruited. The lab is equipped with high quality digital prototyping tools which will enable experimental research and the development of innovative constructive system prototypes. With this area of research, the FabLab will benefit from an anchoring in research. The school’s Grande Nef completes this structure to welcome large-scale experiments. The meeting of the FabLab and the Grande Nef, with its outdoor extensions (Cour du Quatorze and Cour des Fontaines), form a Grands Ateliers-like structure that will serve the development of constructive experimentations at the ENSAV.

We wish to benefit from the project culture inherent to French architecture schools to become a support for scientific and technical experiments in complex situations (etymologically, complex describes what is plaited, interconnected). Indeed, the knowledge within each scientific discipline that is concerned with the act of building (materials science, thermal engineering, mechanics, etc) provides an incomplete understanding of observable phenomena in assembled structures. The recent dissatisfaction around low-energy structures testifies to this fact.

With the ENSAV’s FabLab, this new area of research aims to develop prototypes and pilot installations whose issues are shared between different fields of knowledge (architecture, engineering, sciences) by developing experimental and multidisciplinary objects. This structure would enable the ENSAV to satisfy requests it receives from schools such as the ENS-Saclay, or engineering schools such as the ENSEA or ECAM-EPMA, both members of the Paris-Seine University.

 

Connecting research to the master’s degree program to forge links between pedagogy and research

By relying on the experimental and creative culture at the heart of Matières à Expérimentation, the research professors from this area of research would anchor research in the master’s degree program by enabling reciprocal exchanges between pedagogy and research in order to make doctoral studies more visible and attractive. The master’s degree would be the place of exploratory research, open to original approaches. It would also be an opportunity to formulate hypotheses, the most interesting of which could be developed during a student’s doctoral studies. Reciprocally, researchers could also direct their questions to the experimental abilities of the master’s degree program.

Several concrete actions are under way, including exploratory research on similar existing practices in other French ENSA and European universities in order to help the area of research define its strategical positioning. The question of bio-based materials as crucial the ecological transition emerged from this endeavor. In the academic year 2018-2019, a master’s thesis group Matières à Expérimentation will be created and organized as an introduction-to-research seminar. The theoretical master’s degree class Pensée constructive et architecture contemporaine will join our area of research. Finally, Matières à Expérimentation will join the Social Machine master’s degree workshops. The ties with the project workshops will question the idea according to which an architecture project can be a tool for knowledge as long as it is based on explicit hypotheses, it poses questions that are identified, and the obtained results are objectively assessable. The ENSAV and LéaV’s project will contribute to the creation of the doctorate program.

This area of research is coordinated by Stéphane Berthier.

Cet axe de recherche constitue l’un des marqueurs identitaires de la recherche à l’ÉNSA Versailles. Il s’ancre aussi fortement dans l’enseignement du projet, notamment au sein des ateliers de master (P45), en France mais aussi à l’étranger. Pour exemple, en France, l’atelier « Ruralités métropolitaines », développé en partenariat avec l’ENSPV. L’ÉNSA Versailles a développé de nombreux partenariats internationaux concrétisés dans le cadre de ces ateliers P45, qui ont permis au fil des ans de constituer les éléments d’un atlas de la métropolisation. Comme par le passé, ils pourront être couplés avec des journées d’étude ou des séminaires de recherche. Le double master franco-chinois en anglais (avec le Collège d’architecture, d’urbanisme et de planification de l’Université de Tongji), autour de la problématique de l’écologie urbaine et la chaire partenariale franco-chinoise d’enseignement et de recherche Mobilités métropolitaines innovantes charpentent un socle de partenaires sur lesquels ancrer une recherche finalisée autour des questions de risques et de résilience métropolitains et des nouvelles mobilités. La participation au réseau Designing Heritage Tourism Landscapes International Network (convention, janvier 2018), dont le 3ème séminaire international a été organisé par le LéaV, à l’ÉNSA Versailles, les 12-13 juillet 2018, complète ce dispositif, avec une ouverture internationale renforcée et des interactions évidentes entre l’axe « Métropolisation » et l’axe « Héritage, patrimoine ». Enfin, il faut mentionner la Biennale d’architecture et de paysage d’Île-de-France qui se tiendra à Versailles, en mai-juillet 2019, sur le thème « L’homme, la nature, la ville », qui permettra au LéaV de valoriser ces travaux. 

La notion de territoire est devenue aujourd’hui très générale. Si la référence spatiale y est centrale (J. Lévy, M. Lussault, 2000), le territoire présente une double nature, à la fois matérielle et symbolique, en relation avec les systèmes de représentation et, au travers du vécu, de la perception qu’une diversité d’individus et de groupes a de son « environnement ». Dans la plupart des travaux antérieurs du LéaV, elle est revisitée sous un angle systémique, afin de produire une définition opérationnelle. Le territoire se trouve ainsi placé au cœur de la complexité. Pour comprendre et interpréter le(s) territoire(s), il est alors nécessaire de proposer des outils susceptibles d’aborder la complexité qui sous-tend à la fois les organisations spatiales, mais également les systèmes d’acteurs qui les font évoluer. Le concept de métropolisation n’est pas ici compris comme élément statique, mais comme processus. Historiquement référé au modèle de « La ville à trois vitesses » (Donzelot, 2009), ce thème de recherche présente d’indéniables apports en matière d’analyse des territoires, en articulant trois mouvements urbain : la gentrification, la périurbanisation et la relégation. Les chercheurs du LéaV engagés sur cet axe de recherche font cependant l’hypothèse d’une évolution possible de ce modèle en fonction des nouveaux contextes économiques, sociaux et culturels survenant sur les territoires. Deux arguments abondent en ce sens. Le premier concerne la perspective d’un étalement urbain positif, qui impacterait économiquement et culturellement tous les territoires suburbains. La métropole deviendrait un repère positif pour les habitants des territoires périphériques. Le second argument repose sur l’hypothèse d’une acculturation du suburbain européen au modèle de la suburbia américaine ; la frontière avec l’urbain ne serait plus discriminante mais deviendrait un horizon à dépasser économiquement et culturellement. Partant de ces arguments, l’enjeu théorique est de penser et d’anticiper les évolutions socio-économiques, politiques et écologiques des territoires en fonction de leurs liens aux métropoles. En termes de recherche fondamentale et de recherche appliquée (recherche-action), nos enjeux impliquent d’expérimenter sur les territoires le concept de métropolisation.

Périurbain et péri-métropolitain, zones tampons
Les territoires péri-métropolitains français sont caractérisés par des zones suburbaines économiquement impactées par les métropoles et des territoires plus relégués : post-industriels, post-ruraux, exo-villages, petites villes enclavées. Il s’agit de comprendre les liens dynamiques existant entre l’économie des territoires et les modes d’habiter. Le risque – tant scientifique que politique – est en effet de produire des analyses territoriales statiques référées à des modèles binaires à consonance identitaire (métropoles versus périphéries ; riches versus pauvres ; urbains cosmopolites versus white trash). Nous pensons qu’une telle approche, en opposant métropoles et périphéries, ne peut mener qu’à une opacification de ces dernières et, par-là, à un angle mort de la recherche et de la gouvernance. Nous faisons au contraire l’hypothèse d’un processus subtil et dynamique, exigeant des analyses capables d’introduire toutes les nuances des processus territoriaux. Il s’agit de produire, à terme, des typologies territoriales fines et appréhendables par leur interdépendance.

La question des zones tampons, espaces de relégation et d’indétermination fonctionnelle, va au-delà de la seule distinction entre périurbain et péri-métropolitain. Elle constitue un prolongement de ces premiers questionnements pour aborder la question des limites et des espaces indéterminés, sujets à des mutations ou laissés pour compte. L’objectif du projet de recherche The buffer metropolis: mirroring on sustainable subjects est de savoir comment on peut transformer les infrastructures les plus polluantes (aéro- et fluvio-portuaires, les zones industrielles, logistiques et commerciales, les autoroutes et le rail, etc.) en des véritables tampons soutenables. Il est également possible de se saisir de ces questionnements pour effectuer une comparaison entre métropoles en termes de constat, de projet, de jeu d’acteurs, de gouvernance mais aussi d’information, de concertation, de co-production, etc.

Représentations et usages de la photographie dans les villes  
Ce thème de recherche interroge l’archive photographique et les représentations des métropoles à différents niveaux. Le terrain choisi est l’espace arabe, partant du constat de la structuration, depuis le milieu des années 2000, d’entreprises d’archivage de la photographie et de la diversification des formes et objets de la patrimonialisation dans cet espace. Il s’agit d’abord de considérer l’archive photographique (municipale, privée, associative, etc.) dans sa dimension culturelle, en tant qu’elle constitue une source de connaissance et de valorisation des territoires. Comment et à quel titre la photographie est-elle mobilisée dans la construction de l’image passée et actuelle des villes et quelle place occupe-t-elle de manière plus large dans le contexte des politiques et pratiques patrimoniales ? Il s’agit aussi de voir, dans une perspective institutionnelle et politique, comment l’archive participe aux processus de métropolisation, de rayonnement et de la construction de l’image des villes aux échelles régionale et globale. Elle apparaît, en effet, comme un outil de valorisation de l’image passée et actuelle des villes, un élément clé de la production d’un discours plus ou moins officiel sur la ville et son historicité. Pour aborder cette patrimonialisation de/par l’image des villes dans le monde arabe, nous adoptons une double démarche qui combine une analyse des représentations photographiques et l’ethnographie des institutions culturelles. Cette approche vise à comprendre les liens entre ce qui est donné à voir et ce que l’on dit de la photographie, ce qu’on lui fait dire, à travers des usages divers (indexations, classements, expositions, édition). Elle questionne aussi le statut du médium dans les sociétés arabes, en repérant notamment l’émergence de catégories nouvelles – notamment celle d’une photographie documentaire – et les signes de la professionnalisation, de la valorisation et de la reconnaissance du travail des photographes.

Villes transfrontalières
Dans la lignée de plusieurs travaux du précédent contrat, ce programme cherche à identifier les dynamiques de métropolisation à travers leurs relations avec les logiques frontalières. Les frontières s’imposent parfois aux villes (Berlin ou Jérusalem). Elles peuvent aussi les empêcher de suivre leur développement « naturel » dicté par la géographie et/ou l’opportunisme économique (ex. dans l’Europe centrale). Elles peuvent aussi être éloignées, mais avoir un impact local dramatique (la « jungle » de Calais, l’émigration « méditerranéenne » en Grèce et Italie). Elles peuvent enfin offrir des opportunités qui fabriquent des continuités urbaines schizophrènes (la frontière entre les États-Unis et le Mexique). Pour appréhender cette typologie, une approche en trois temps est proposée : Le benchmarking, dans une optique très large, permet d’identifier les mécanismes de la dynamique transfrontalière. Il permet aussi une indispensable prise de conscience de la transversalité du phénomène. L’échelle européenne, avec les cas frontaliers « classiques » (notamment la France avec l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie), les riverains (le Rhin et le Danube), les cas paradoxaux (la Suisse, Monaco, Andorre … et la Méditerranée). Le cas d’étude (le projet), en un troisième temps, porte sur le cas bucarestois ; il a pour objectif de comprendre la constitution des frontières – réelles ou imaginaires – dans la capitale, en suivant sa stratification historique et ses évolutions sociales et urbaines. Cette étude de cas lie fortement recherche et projet urbain, dans la compréhension des dynamiques urbaines et des évolutions possibles pour la ville.

Cet axe est coordonné par Sophie Brones et Maud Santini.

 

Metropolis and territorial development

 

This area of research constitutes the core identity of research at the ENSAV. It is deeply anchored in project instruction, notably in the master’s workshops (P45) in France as well as abroad. For instance, in France, the workshop “Metropolitan Ruralities” (Ruralités métropolitaines) was developed in partnership with the ENSPV. The ENSAV has developed numerous international partnerships that were solidified in the P45 workshops and led to the development, over the years, of an atlas of metropolis development, or metropolization. These workshops could be paired with conferences or research seminars as they have been in the past. The French-Chinese double master’s degree in English, in partnership with Tongji University’s College of Architecture and Urban Planning and centered around the issue of urban ecology, and the French-Chinese Chair of Innovative Metropolitan Mobility both provide a structure for the study of metropolitan risks and resilience and new mobilities. Our participation in the Designing Heritage Tourism Landscapes International Network (January 2018), whose third international seminar was organized by the LéaV at the ENSAV on July 12-13, 2018, completes this structure and reinforces our international position. Obvious connections can be made between the area of research “Metropolization” and “Heritage.” Finally, the Ile-de-France Architecture and Landscape Biennial will be held in Versailles, from May to July 2019, around the theme “Man, Nature, City” which will be an opportunity for LéaV to display its work.

Spatiality is central in the contemporary conception of territory (J. Lévy, M. Lussault, 2000), yet it is a dual notion, both material and symbolic, connected to systems of representation and, through personal experiences, to the perception that individuals and groups have of their “environment.” In most of LéaV’s previous work, the notion of territory is analyzed from a systemic angle in order to define it operationally. Territory as a notion is thus inherently complex. To understand and interpret territories, it is necessary to propose tools that allow us to address the complexity that underlies spatial organization as well as the systems of actors involved in the territory’s evolution. Here, the concept of metropolization is not analyzed as static but rather as a process. Historically tied to the model of “the three-speed city” (Donzelot, 2009), this area of research offers contributions to the analysis of territories by articulating three urban movements: gentrification, periurbanization, and relegation. LéaV’s researchers involved in this area speculate that this model will possibly evolve as new economic, social, and cultural contexts shape territories. Two arguments point to this evolution. Firstly, a positive urban sprawl may economically and culturally impact all suburban territories. The metropolis would become a positive place for those who inhabit peripheral territories. Secondly, European suburbia may undergo acculturation, following the example of American suburbia. The urban frontier would no longer be a source of discrimination, but would rather become a horizon to cross, both economically and culturally. Given these arguments, our theoretical approach is to think and anticipate the socio-economic, political, and ecological evolutions of territories according to their ties to the metropolis. In terms of fundamental research and applied research (research-action), our issues require that we test the very concept of metropolization on territories.

Periurban and perimetropolitan, buffer zones
French perimetropolitan territories are characterized by suburban zones that are economically impacted by the metropolis and by farther-removed territories (post-industrial, post-rural, small enclosed cities). What are the current, dynamic ties between the economy of territories and modes of inhabiting them? The risk, both scientific and political, lies in producing territorial analysis statistics that refer to binary models tied to identity (metropolis vs. periphery, rich vs. poor, urban cosmopolites vs. white trash). We believe that this approach which opposes metropolis and periphery can only render these terms opaquer and therefore lead to a blind spot, both for research and governance. We envision a different approach, subtle and dynamic, that would require analyses that fully grasp the nuances of territorial processes. Ultimately, we aim to produce territorial typologies that are subtle and apprehensible through their interdependence.

The question of buffer zones – spaces of relegation and functional indetermination – goes beyond the mere distinction between the periurban and the perimetropolitan. It extends past these issues to address the question of limits and indeterminate spaces that are subjected to mutations or neglect. The research project The Buffer Metropolis: Mirroring on Sustainable Subjects asks how the most polluting infrastructures (airports, ports, industrial, logistical, and commercial zones, highways, railways, etc.) could be transformed into actual sustainable buffers. These questions can also allow for a comparison between metropolises in terms of assessment, project, actor-networks, governance, but also information, concertation, co-production, etc.).

Representations and uses of photography in cities
This research theme questions the photographic archive and the representations of metropolises at different levels. We chose the Arab world where photography archiving companies have emerged since the mid-2000s and where the forms and objects of heritagization (the process through which objects, places and practices are turned into cultural heritage) have diversified. We must first consider the photography archive (municipal, private, etc.) in its ability to be a source of knowledge and promotion of territories. How and why is photography used in the construction of the past and present image of cities? Which role does it have in the larger context of heritage politics and practices? From an institutional perspective, how does the archive take part in the process of metropolization, of influence, and of the construction of a city’s image on the regional and global scale? The archive appears to be a tool that makes the past and present image of cities attractive, a key element in the production of a more or less official discourse on the city and its historicity. To address the ties between heritage and the image of cities in the Arab world, our approach will combine an analysis of photographic representations and an ethnography of cultural institutions. This approach aims at analyzing the relation between what is shown and what is said about photography, and what one makes photography say through different practices (indexations, classification, exhibition, edition). We also question the status of photography in Arab societies by observing the emergence of new categories – notably documentary photography – and tracking the professionalization, promotion, and recognition of the work of photographers.

Cross-border cities
In line with several projects from the previous contract, this program aims at identifying metropolization processes through their relation with border-related issues. Borders can sometimes impose themselves on cities (Berlin or Jerusalem). They can also prevent cities from experiencing their “natural” development as dictated by geography and/or economic opportunism (in Central Europe) for instance. They can also be far-removed but have a dramatic local impact (the Calais Jungle, Mediterranean emigration in Greece in Italy). Finally, they can offer opportunities that create fractured urban continuities (the United States-Mexico border). A three-step approach is offered to grasp this typology: firstly, benchmarking helps identifying the mechanisms of cross-border dynamics and it also promotes a necessary awareness of the phenomenon’s transversality. Second step: the European scale, with its “classic” border cases (France with Germany, Spain, and Italy), its rivers (Danube, Rhine), and its paradoxical cases (Switzerland, Monaco, Andorra… and the Mediterranean). Third step: the case study (the project) which focuses on Bucharest and aims to understand the constitution of borders (whether real or imaginary) in the capital city by following its historical stratification and its social and urban evolutions. This case study brings together research and urban project in order to comprehend urban processes and the possible evolution of the city.

This area of research is coordinated by Sophie Brones et Maud Santini.

L’environnement construit, qu’il soit ancien ou contemporain, les stratifications successives de la ville et des paysages, dont la complexité pose des défis constamment renouvelés de lecture et de compréhension, forment plus que jamais des questions actuelles. L’inscription du projet architectural dans un environnement existant, la pensée sur la ville et ses flux, les demandes en faveur d’une approche durable des territoires, soulèvent des questions sur l’inscription des nouveaux projets dans la ville héritée. Car penser le projet et la ville aujourd’hui dans une vision renouvelée de nos modes de vie suppose de l’insérer dans une réflexion globale tenant compte des dynamiques patrimoniales sous-jacentes aux transformations des territoires.

Plusieurs approches et outils permettent de travailler sur les savoirs, les modes de représentation et de transmission. Nombreux parmi ces moyens sont exploités concomitamment dans des projets de recherche et dans l’enseignement. En collaboration avec la Fondation des Science du Patrimoine, le projet DIM MAP permet à l’échelle de l’Île-de-France de construire des relations étroites entre sciences de l’homme, de l’environnement et les sciences physico-chimiques. Par l’étude des objets et de la matérialité des œuvres, cette entrée interdisciplinaire permet d’orienter les recherches sur l’historicité de la matière des œuvres, une question incontournable pour les bâtiments. La relation fructueuse nouée avec la Fondation des sciences du patrimoine et les équipes de ce périmètre régional demande ainsi à être encouragée et renforcée.

Les deux masters associés à l’ÉNSA Versailles font de la recherche un axe central : le master « Jardins historiques, patrimoine et paysage », dont le rapprochement et l’habilitation prochaine avec l’École universitaire de recherche (EUR) de la ComUE Paris-Seine laissent augurer des collaborations interdisciplinaires nouvelles et fructueuses ; le master « Architecture et ses territoires » (AST) dont l’association avec l’Université de Paris-Saclay est confortée, évolue vers un intérêt marqué pour les sciences de la restauration et l’expertise patrimoniale ; ils pourront rejoindre à terme le projet de création d’une formation spécifique – DSA ou autres – dispensée par l’ÉNSA Versailles. Par ailleurs, de nouvelles perspectives pédagogiques et de recherche sur les modes de représentation visent à faire évoluer la connaissance de l’existant. Les études opérationnelles, les relevés, les initiatives prospectives, les enquêtes, la diversité des échelles urbaines sur lesquelles se penche la recherche, forment autant de leviers d’action pour étudier les lieux en les saisissant dans leur complexité.

Héritages et développement durable des territoires
Comprendre les enjeux liés à la préservation des environnements urbains et ruraux, leur transmission dans des cadres règlementaires changeants et leur potentiel d’adaptation face aux évolutions des sociétés et aux équilibres menacés du monde vivant, repose sur une analyse approfondie des sites, des bâtiments ou des objets et des dynamiques qui ont marqué leur évolution. Il s’agit tout autant d’interroger certaines formes urbaines et bâties ou certains territoires et projets paysagers aujourd’hui en déshérence – architectures de la reconstruction, parcs urbains, zones suburbaines –, que de penser leur pérennité dans une approche concrète de l’aménagement territorial et urbain. La lecture qui peut en être faite est conditionnée par des stratégies de développement économique dont les temporalités ne coïncident pas toujours avec une réflexion mûrie sur le projet de reconversion. Le rapport qu’entretiennent les habitants avec d’anciens bâtiments dont ils sont aujourd’hui les usagers (« Façons d’habiter le XVIIIe arrondissement »), les analyses réalisées sur des ensembles urbains et paysagers, conçus ou transformés au XXe siècle (Diagnostics historiques et paysagers du master JHPP), la capacité d’adaptation aux nouvelles règlementations environnementales et la question énergétique (« Architectures de la reconstruction en Val-de-Loire »), forment autant de problématiques qu’il y a de volontés de les traiter de manière savante et nuancée.  

Interroger les processus de construction patrimoniale
Les actions de patrimonialisation ne découlent pas nécessairement de l’évidence de la valeur des édifices et des sites. Elles sont changeantes en fonction des priorités données à chaque époque par des groupes différents, de ce qui est jugé comme digne d’intérêt et représentatif de valeurs communes. Cette analyse permet de pointer les mécanismes à l’œuvre dans les opérations de valorisation, comme d’expliquer les oublis ou les destructions. Parmi les actions de recherche, « La relecture critique de la Charte de Florence » sur les parcs publics urbains historiques découle de l’actualité donnée à cette question par ICOMOS International, et l’intérêt de confronter cette analyse avec les recherches menées sur la Charte de Venise. L’extension du champ patrimonial aux architectures banales est l’occasion d’interroger la relation qu’entretiennent les œuvres d’art et les aménagements mobiliers avec la conception de l’espace. Cette question peut être associée avec les interrogations plus générales sur les différentes modalités d’interventions en faveur d’opérations de restauration sur les monuments des XIXe et XXe siècle. Enfin, l’exploitation touristique donnée à travers les « souvenirs », images ou objets à forte tradition populaire, montre comment l’objet et ses multiples déclinaisons commerciales agissent dans les processus de patrimonialisation des édifices. 

Développements culturels et touristiques
Les phénomènes de métropolisation mondiale sont aujourd’hui interrogés au prisme des flux touristiques, garants d’un développement économique et de mises en valeur assurant la sauvegarde des ensembles urbains. Mais parfois aussi, ces actions conduisent à des exploitations excessives qui modifient les lieux en faveur d’une réponse à la demande touristique. Entre sauvegardes et altérations, transmissions et évolutions, la problématique relative aux développements touristiques est riche de questionnement autour de la valorisation touristique des sites, de l’évolution des équipements et de la conservation des ensembles urbains. La participation au réseau Designing Heritage Tourism Landscapes International Network, la proposition d’organisation d’un workshop portant sur « Tourisme et patrimoine », celle d’un colloque « Paysages culturels, nouvelles lectures des territoires » et la participation à la Biennale d’architecture, d’urbanisme et de paysage en 2019, forment autant d’occasions de développements d’une problématique partagée par de nombreuses équipes de recherche. Les quartiers, les espaces publics et leurs bâtiments emblématiques sont soumis à des nouvelles hybridations d’usages et à des flux inédits. Sous une apparente stabilité, certains paysages urbains sont investis par de profondes mutations, d’autres secteurs, officiellement muséifiés, sont a contrario transformés progressivement pour consolider leur attractivité. Une analyse rétrospective du projet patrimonial porté par le XXe siècle peut fonder un regard renouvelé sur les dynamiques en cours et en saisir le potentiel et les fragilités. La collaboration avec le Conseil départemental des Yvelines dans l’étude d’un panel représentatif de collèges permettra d’engager les étudiants du master AST dans des études approfondies sur des édifices récents, et de contribuer à une sensibilisation des publics locaux à leur territoire.

Cultures professionnelles, médiations et transferts culturels
L’analyse des corpus de revues forme matière pour comprendre les phénomènes d’acculturation, de transmission des savoirs et des modes de représentation de l’espace. Parmi ceux-ci, l’étude des revues muséales constitue un support d’analyse des relations entre concepteurs des espaces intérieurs et professionnels de la conservation. Y est posée la question des modèles, des modes de diffusion, de la rhétorique propre à des catégories professionnelles distinctes et la manière dont elles peuvent dialoguer au service du projet d’aménagement intérieur. Dans cette visée interprofessionnelle, la recherche portant sur « Comment lire la revue Aujourd’hui : art et architecture », interroge tout à la fois les modes de communication propres à la revue que la constitution d’une nouvelle relation entre art et architecture. Enfin, les types de médias sont analysés autant pour leur rôle informatif – relater l’évènement, comprendre la ville – que dans leur capacité à constituer de nouvelles catégories de corpus scientifique. Mené avec l’ENSPV, avec laquelle les liens naturels ont été récemment resserrés, le projet autour des archives des concepteurs paysagistes du XXe siècle interroge les processus de patrimonialisation en même temps qu’il veut forger les outils de collecte, d’analyse et de médiation de ces cultures professionnelles ; l’étude des transferts culturels autour des savoir-faire jardiniers, notamment les liens établis entre la France, l’Italie et l’Allemagne aux XIXe et XXe, par un effet de distanciation, contribue à la réflexion sur les réappropriations de gestes anciens pour affronter les défis environnementaux.

Cet axe est coordonné par Stéphanie de Courtois

 

Heritage, patrimony and creation

 

The constructed environment, whether historical or contemporary, and the successive stratifications of the city and landscapes, whose complexity poses endless challenges to their reading and interpretation, are, now more than ever, current issues. The inscription of the architectural project into an existing environment, thought on city and its fluxes, and requests for a sustainable approach to territories all pose questions about the insertion of new projects in the inherited city. To think the project and the city today in a renewed vision of our lifestyles is to insert the project in a global reflection that considers the patrimonial dynamics that underlie the transformation of territories.

One can adopt several approaches and tools to work on knowledge and modes of representation and transmission. Many of these resources are used simultaneously in research projects and education. The DIM MAP project, in collaboration with the Foundation for Cultural Heritage Sciences (Fondation des Sciences du Patrimoine), brings chemical physics and the human and environmental sciences closer in Ile-de-France. Through the study of objects and the materiality of œuvres, this interdisciplinary approach orients research toward the historicity of the works’ material, an essential question for buildings. Our fruitful relationship with the Foundation and the teams located in this region must be encouraged and reinforced.

The two master’s degree programs at the ENSAV place research at their center: the program “Historical gardens, heritage, and landscape” (JHPP for Jardins historiques, patrimoine et paysage) holds ties with the ComUE Paris-Seine’s EUR – ties which promise new interdisciplinary and fruitful collaborations; the program “Architecture and its Territories” (AST for Architecture et ses territoires) in partnership with the Paris-Saclay University is evolving toward restoration sciences and cultural heritage expertise. Ultimately, these programs will become part of ENSAV’s project to create specific degrees. Also, new pedagogical and research-related perspectives on modes of representation allow for the transformation of our existing knowledge. Feasibility studies, plans, prospective initiatives, studies, the diversity of urban scales that research considers are all levers to study places by grasping their complexity.

Heritage and sustainable development of territories
To understand the issues at the heart of the preservation of urban and rural environments, the transmission of these environments within changing regulatory framework and their potential for adaption when faced with the evolution of societies and the threatened equilibrium of living beings, requires an in-depth analysis of sites, buildings, or objects and of the dynamics that marked their evolution. We must also question certain urban and built forms, or certain territories and landscape projects, that are neglected today – architecture of reconstruction, urban parks, suburban zones – as well as take a concrete approach to territorial and urban planning to think about their permanence. Strategies of economic development propose temporalities that do not always coincide with the careful reflection involved in a reconversion process. The relationship that inhabitants share with old buildings that they now inhabit (“Ways to Live in the Eighteenth Arrondissement,” “Façons d’habiter le XVIIIe arrondissement”), analyses of urban and environmental complexes designed or transformed in the twentieth century (historical and environmental diagnostics of the JHPP master’s program), the capacity for adaptation to new environmental regulations, and the energy issue (“Architectures of Reconstruction in Val-de-Loire,” “Architectures de la reconstruction en Val-de-Loire”) are all questions that we want to address in nuanced and skillful ways.

Questioning the processes of patrimonial construction
The development of cultural heritage does not necessarily come from the manifest worth of monuments and sites. It evolves depending on the priorities of different groups at different times, according to what is considered worthy of interest and representative of shared values. This analysis highlights the mechanisms at work in enhancement operations and explains destruction and neglect. Among our research actions, “the critical rereading of the Florence Charter” on public urban historical parks was inspired by a renewed interest for the matter (which was stimulated by ICOMOS International), and the comparison of this analysis to research led on the Venice Charter. The extension of the notion of cultural heritage to “unremarkable” architecture is an opportunity to question the relation between works of art and interior design with the conception of space. This question can be tied to more general ones regarding different ways of intervening in favor of restauration operations on nineteenth and twentieth century monuments. Finally, the tourism activated by these “memories” (images or objects that strongly evoke popular tradition) shows how objects and their multiple commercial variations are part of the process by which buildings enter the realm of cultural heritage.

Cultural and tourism developments
Today, world metropolisation phenomena are analyzed through the prism of tourism fluxes that guarantee an economic development and enhancement that will safeguard these urban structures. But sometimes these actions lead to excessive use that modify places to respond to demands from the tourism industry. Between protection and alteration, transmission and evolution, the issue of tourism development poses questions about the tourism-related promotion of sites, the evolution of equipment, and the conservation of urban structures. Our participation to the Designing Heritage Tourism Landscapes International Network, our offer to organize a workshop on tourism and heritage and a symposium “Cultural landscapes, new readings or territories,” and our participation to the Architecture, Urbanism, and Landscape Biennial in 2019 are all opportunities to develop a set of questions that will be shared by numerous research teams. Neighborhoods, publics spaces, and their emblematic buildings undergo new hybridizations of uses and experience new fluxes. Behind their apparent stability, some urban landscapes experience profound changes. Meanwhile, other sectors that have officially been “museified” are progressively transformed to strengthen their attractiveness. A retrospective analysis of the heritage project carried out in the twentieth century could offer a renewed outlook on these ongoing dynamics in order to understand their potential and fragilities. Our collaboration with the Conseil départemental des Yvelines (Departmental Council of the Yvelines) in our survey of a representative panel of colleagues will engage the AST master’s students in in-depth studies of recent buildings and will contribute to raising the local public’s consciousness of its own territory.

Professional cultures, cultural mediations and transfers
Analyzing a corpus of publications provides ways to understand the phenomena of acculturation, of knowledge transmission, and of modes of representing space. Among these, the study of museum publications allows one to analyze the relation between interior designers and conservation professionals. This analysis gives rise to questions around models, modes of diffusion, the rhetoric of each professional category, and the way in which these categories can enter into dialogue to serve an interior design project. With this interprofessional goal, the research project “How to read the publication Aujourd’hui : art et architecture” questions both the publication’s own modes of communication and the creation of a new relationship between art and architecture. Finally, various media are analyzed in their informative role (to relate events, to help understand a city) and their capacity to constitute new categories of a scientific corpus. Led with the ENSPV, which has naturally become a closer partner, the project around the archives of twentieth-century landscape designers questions the development of cultural heritage while developing tools to collect, analyze and mediate these professional cultures. The study of cultural transfers around garden expertise, and notably France, Italy, and Germany’s developing ties in the nineteenth and twentieth centuries, contributes to the reflection on the reappropriation of old processes to face environmental challenges.

This area of research is coordinated by Stéphanie de Courtois.

L’attention portée à la notion de spatialité en tant que concept opératoire qui permet de déchiffrer l’histoire de l’architecture, de la ville et des territoires, fait émerger les qualités objectives des lieux vécus, qui sont d’ordre dimensionnel, géométrique, liés aux variations de lumière, mais aussi de qualités subjectives de nature psychologique qui s’enracinent dans les théories d’Auguste Schmarsow, de Heinrich Wölfflin et de Wilhelm Worringer. Dans l’interprétation de l’architecture comme « Raumgestaltung », Schmarsow insistait particulièrement sur le « sentiment de la spatialité », tout en contribuant à orienter l’attention des critiques (et les préoccupations des artistes) aussi bien sur les valeurs spatiales propres à l’objet que sur l’expérience sensorielle de l’observateur qui saisit ces valeurs en parcourant « tactilement » et « optiquement » l’espace architectural. Cette notion est à l’origine de l’attention portée aux dispositifs qui articulent l’expérience de l’observateur, tels les seuils marquant le passage entre lieux pourvus de différentes qualités, les trompe-l’œil, les déplacements physiques et visuels activant des « effets spatiaux », la question du cadrage – ou de la dissolution du cadre (Wölfflin). Une question se pose alors sur les modalités d’analyse visant à saisir cette complexité particulièrement marquée dans les œuvres déterminées par les croisements entre architecture et arts visuels (la peinture et la sculpture, en particulier). D’un point de vue méthodologique, il ne s’agit donc pas de remplacer le mot « tableau » par « édifice », mais d’interroger le projet architectural telle une figure particulière qui répond à des règles et une structure propres. 

Interactions entre l’architecture et les arts
Proposée avec engagement par les avant-gardes artistiques au début du XXe siècle par des groupes opérant au sein du Mouvement Moderne (Bauhaus, De Stijl, etc.) et des protagonistes (Le Corbusier, Max Bill, André Bloc, etc.), l’idée de l’interaction entre les arts – et, en même temps, la recherche et l’élaboration d’expressions où se confondent les champs artistiques au sens traditionnel – s’affirme tout au long du XXe siècle. La mise en évidence de cette relation a fait l’objet de nombreuses recherches déjà, mais nous souhaitons travailler plus précisément sur le phénomène d’interaction comme principe fécond de conception du projet. Le but du Groupe Espace (1951) ainsi que du MAC/Espace (1955) était de constituer des chantiers de synthèse « au pied du mur » pour concevoir sciemment des œuvres collectives transdisciplinaires. Le projet de recherche « Découvrir l’œuvre et la figure d’André Bloc (1896-1966) », sur lequel travaille le LéaV depuis trois ans et qui a fait l’objet de l’organisation de trois colloques internationaux, visait à comprendre le rôle que ce protagoniste a joué dans la définition de la catégorie de l’architecture-sculpture et de l’architecture organique dans la production de l’architecture des années 1960 et 1970. Le projet de recherche à venir sur « Pierre Székely et les arts de l’espace » vise à évaluer la contribution de cet artiste hongrois installé en France, qui a abordé le projet architectural selon un angle plastique ; ce projet se situe ainsi dans le prolongement immédiat des résultats de recherche obtenus dans le projet de recherche sur André Bloc.

Les croisements entre arts et architecture s’étendant de plus en plus aux disciplines du design et du graphisme, des collaborations avec l’ENS de Paris-Saclay ont été établies au niveau de la codirection de thèses de doctorat et de partenariats sur des projets de recherche. Le projet « Problemata. Plateforme numérique de diffusion des résultats de recherches en histoire du design, critical writing et design studies » (porté par le Département design de l’ENS Saclay, en partenariat avec le LéaV, dans le cadre des appels à projets de la MSH Saclay), en ouvrant une plateforme numérique pour la publication bilingue français-anglais des écrits sur le design rédigé par les chercheurs du réseau, mais aussi par des designers célèbres, contribue à retracer ces formes d’interaction avec l’architecture et les espaces intérieurs, y compris les interstices urbains. D’autre part, le projet « Comment lire la revue Aujourd’hui, Art et architecture » propose une étude systématique des 60 livraisons de la revue, afin de tirer des conclusions sur le rôle que ce périodique a joué en termes de diffusion des modèles et d’idée de synthèse des arts.

Les espaces intérieurs : une approche par le prisme des ambiances
Les espaces intérieurs se sont souvent révélés des lieux d’expérimentation de différents acteurs professionnels œuvrant à un même projet (architectes, artistes, décorateurs, ensembliers, designers...). Partagés entre plusieurs histoires partielles (de l’architecture, de l’art, du design, de l’aménagement intérieur, du décor, de l’habitat, de l’évolution du goût et de la société, etc.), les intérieurs ont souvent été abordés selon des perspectives thématiques mono-disciplinaires, qui n’ont pas pris pas en compte la complexité épistémologique de l’approche des espaces : l’investigation à travers la notion d’ambiance permet de réaliser l’étude des espaces physiques à travers le prisme des éléments immatériels, que sont la lumière, les sons, et toute une catégorie d’éléments qui participent à l’appréciation de la dimension sensorielle des espaces. La Stimmung vise à susciter des sensations tactiles ou des synesthésies, des émotions régulées par les variations d’éclairage naturel et artificiel, la présence d’œuvres d’art (points focaux), des dispositifs qui créent des atmosphères suggestives ; en somme, cette notion de spatialité s’avère polysémique, ce qui nous amène à considérer les intérieurs architecturaux du XXe siècle comme des lieux de sédimentation et de révélation de différentes intentionnalités. Le projet de recherche « Intérieurs milanais entre architecture et arts visuels (1946-1973) » interroge justement la complexité de ces environnements à travers une approche interdisciplinaire et à l’aide de plusieurs instruments critiques qui seront au cœur du colloque international « Manières d’approcher les espaces intérieurs. Interdisciplinarité et méthodologies », prévu en 2019. Enfin, l’usage du concept « d’intermédialité » propose un élargissement de la recherche par les ambiances en introduisant l’importance des relations entre les médias, les dispositifs et les valeurs réceptives des sujets. Enoncé en 1966 dans le texte fondateur « Statement of Intermedia » de l’écrivain-artiste Dick Higgins, le concept d’intermédialité peut constituer un point de départ de recherches situées à la croisée de différents arts visuels et dont la spatialité serait le point commun. Nous proposons ainsi, par la corrélation d’approches complémentaires, l’expérimentation vers de nouvelles méthodes de recherche. Si l’approche méthodologique par les ambiances peut apporter de éléments substantiels pour comprendre le rapport que nous entretenons avec notre environnement, dans sa perception, comme dans les réactions qu’il provoque en nous, le rapprochement de concepts et de méthodes, permet de prospecter de nouveaux champs d’analyse.

Les nouvelles technologies au service d’une approche sensible des espaces
La perception de l’environnement peut générer en nous de fortes sensations corporelles telles que le vertige, la dérive, la sensation d’être à l’intérieur ou au contraire extérieurs à une expérience, par exemple. Par conséquent, il participe à l’expression d’émotions telles que la familiarité, la sécurité, l’identité, mais aussi des émotions universelles comme la joie, la peur, le plaisir, le dégoût, la douleur, la colère, etc. L’émotion constitue la réalité corporelle et aussi mentale qui émerge du plus profond de notre existence et repose parfois sur des archétypes renvoyant à une expérience inconsciente qui se révélerait. En tant que projection de notre identité sur notre environnement, cette réalité prend la forme d’images concrètes, de formes palpables qui se reconstituent en chacun de nous de manière subjective mais transmissible.

Le projet de recherche « Formes émouvantes. Sur la captation savante de l’œuvre d’architecture au XXe siècle » vise justement à dépasser les difficultés d’aborder l’implication de l’observateur dans les processus de « coopération interprétative » avec le texte architectural ou artistique, tout particulièrement quand cela produit d’importantes retombées émotives, pathos, embarras, désorientation, grâce à la mise en scène d’ambiguïtés ou d’illusions spatiales, dans le but de mobiliser les sens et la sphère psychique de l’observateur. Le développement de nouvelles méthodes d’analyse visant à étudier les relations entre les « formes émouvantes » – figures de la sphère affective, émotionnelle et psychique – et l’observateur/interprète, prend appui sur les recherches menées dans le domaine des sciences cognitives, des neurosciences, de la sémiotique des passions, de la perception et de l’image, ainsi que sur les pratiques de la sémiotique tensive. Les dispositifs méthodologiques empruntés à ces disciplines sont testés sur un corpus d’œuvres d’architecture-sculpture, à la morphologie marquée par la gestualité de l’architecte-artiste, ou qui se positionnent à la limite entre différents disciplines (André Bloc, Pierre Székely, Chanéac, Alberto Ponis, etc.). Démarche empirique et approche théorique sont ici complémentaires.

Cet axe est coordonné par Annalisa Viati Navone.

 

Spaces, bodies and sensitivities

 

Paying attention to the notion of spatiality as an operating concept to decipher the history of architecture, city, and territories, brings to the foreground the objective qualities of lived places – qualities that are dimensional, geometrical, tied to light variations, but also subjective, of a psychological nature that takes roots in the theories of Auguste Schmarsow, Heinrich Wölfflin, and Wilhelm Worringer. In his interpretation of architecture as Raumgestaltung, Schmarsow insisted on the “sentiment of spatiality” while directing the critic’s attention (and the artists’ preoccupations) as much on spatial values tied to the object as on the sensory experience of the observer who experiences these values by a tactile and optic exploration of the architectural space. This notion is at the root of the attention placed on systems that articulate the observer’s experience, systems such as thresholds that mark the passage between places endowed with different qualities, trompe-l’œils, physical and visual transfers that activate “spatial effects,” or the question of framing, or of the dissolution of the frame (Wölfflin). A question then poses itself regarding the modalities of analysis that aim to grasp this complexity that is particularly marked in works that are at the crossroads of architecture and visual arts (particularly painting and sculpture). From a methodological standpoint, the word “painting” should not be replaced by “building” but we should question the architecture project as a particular figure that has its own rules and structure.

Interactions between architecture and the arts
Artistic avant-gardes at the beginning of the twentieth century, such as Modernist groups (Bauhaus, De Stijl, etc.) and protagonists such as Le Corbusier, Max Bill, André Bloc, etc., proposed an idea that asserted itself throughout the century, that of the interaction between the arts as well as the research for and elaboration of artistic expressions where different artistic fields merge. This relationship has already been the subject of many studies but we wish to focus more precisely on interaction as a phenomenon that constitutes the fertile principle of project design. The aim of Groupe Espace (1951) or MAC/Espace (1955) was to form synthesis sites to create collective transdisciplinary work. The research project “Discovering André Bloc’s œuvre and figure (1896-1996),” on which LéaV worked for three years and which was the object of three international conferences, aimed to understand Bloc’s role in defining the architecture-sculpture category and organic architecture in the production of architecture in the 1960s and 1970s. The upcoming research project on “Pierre Székely and arts of space” aims to evaluate the French-based Hungarian artist’s contribution. He approached the architectural project through a plastic angle and his project is thus an extension of our research results from our work on Bloc.

As crossings between the arts and architecture occur more and more in the disciplines of design and graphic design, we have collaborated with the ENS Paris-Saclay to establish co-directions of doctoral dissertations and partnerships on research projects. The project “Problemata. Digital platform for the diffusion of research results in the history of design, critical writing, and design studies” (led by the ENS Saclay’s design department, in partnership with LéaV, in the context of the MSH Saclay’s call for projects) contributes to the recounting of interactions between architecture and interior spaces, including urban interstices, by opening a digital platform for the bilingual (French-English) publication of writings about design written by researchers from our network, but also by designers. The project “How to read the publication Aujourd’hui, Art et architecture” studies this publication’s sixty issues in order to analyze the role this periodical played in diffusing models and ideas that relate to the synthesis of the arts.

Interior spaces: an approach through the prism of ambiances
Interior spaces have often revealed themselves to be places of experimentation for different professional actors who work on the same project (architects, artists, decorators, interior designers, designers…). In between several partial histories (that of architecture, art, design, interior design, decoration, habitat, evolution of taste and society, etc.), interior spaces have often been approached through thematic monodisciplinary perspectives that have not taken into account the epistemological complexity of the approach to space. Investigating space though the notion of ambiance allows us to study physical spaces through the prism of immaterial elements such as light, sounds, and other elements that participate in the sensory dimension of spaces. Stimmung aims to generate tactile sensations, synesthesia, emotions regulated by variations in natural or artificial lighting, the presence of works of art (focal points), systems that create suggestive atmospheres. To summarize, the polysemous notion of spatiality leads us to consider twentieth-century architectural interiors as places of sedimentation that reveal different intentions. The research project “Milanese interiors between architecture and visual arts (1946-1973)” rightly interrogates the complexity inherent to these places through an interdisciplinary approach, with the help of multiple critical tools that will be at the heart of the international conference “Ways of approaching interior spaces. Interdisciplinarity and methodologies” scheduled in 2019. Finally, the concept of “intermediality” is an opportunity to widen our research on ambiances by introducing the relations between media, systems, and the receptive values of subjects. Intermediality was first defined in 1966 in artist-writer Dick Higgins’ “Statement of Intermedia” and can serve as a starting point for research at the crossroads of different kinds of visual arts that all relate to spatiality. We thus propose to experiment new research methods by correlating approaches that are complementary. If a methodological approach to ambiances can bring substantial elements to understand our relationship to our environment (how we perceive it and the reactions it elicits), bringing together concepts and methods will allow us to investigate new fields of analysis.

New technologies serving a sensitive approach to spaces
Our perception of our environment can elicit strong corporeal sensations such as vertigo, drifting, or the feeling of being inside or outside of an experience. Consequently, the environment contributes to the expression of emotions such as familiarity, safety, identity, as well as universal ones such as joy, fear, pleasure, disgust, pain, anger, etc. Emotion makes up our corporeal and mental reality. It emerges from the deepest part of our being and sometimes relies on archetypes that relate to an unconscious experience. As a projection of our identity on our environment, this reality takes the form of concrete images and palpable forms that are recreated within us subjectively but that are also transmissible.

The research project “Moving forms. On the skillful capture of the architectural work in the twentieth century” (Formes émouvantes. Sur la captation savante de l’œuvre d’architecture au XXe siècle) aims to go beyond the difficulties involved in addressing the observer’s implication in processes of “interpretive cooperation” with the architectural or artistic text, especially when it produces strong emotional effects (such as pathos, embarrassment, or disorientation) through the staging of ambiguities or spatial illusions that aim to mobilize the observer’s senses and mind. New methods of analysis that aim to study the relations between “moving forms” – figures of the affective, emotional, and mental sphere – and the observer/interpreter have developed and rely on research in the fields of cognitive sciences, neurosciences, semiotics of passions, perception, and image, as well as on practices in tensive semiotics. Methodological systems borrowed from these disciplines are tested on a corpus of architecture-sculpture work that either has a morphology that bears the mark of the architect-artist or is at the threshold of different disciplines (André Bloc, Pierre Székely, Chanéac, Alberto Ponis, etc.) Here, empirical and theoretical approaches are complementary.

This area of research if coordinated by Annalisa Viati Navone.